MOREAU Charles
¤ 6 septembre 1892 à Arnay-le-Duc
† 5 avril 1915 au bois d’Ailly (Meuse) [décès officialisé à cette date]
2e classe – 27e régiment d’infanterie – 22 ans
Disparu
Mort pour la France
Acte de naissance
N°97
Acte de naissance
de
Moreau, Charles
(légitime)
—
Du 7 septembre 1892
—
L’an mil huit cent quatre vingt douze, le sept septembre à l’heure de neuf et demie du matin, heure légale, pardevant nous, Vollot, Antoine-François, maire, officier de l’état civil de la ville d’Arnay-le-Duc, chef-lieu de canton, arrondissement de Beaune, département de la Côte-d’Or. A comparu le sieur Moreau, Charles, âgé de trente-quatre ans, ferblantier, domicilié à Arnay-le-Duc, rue de Dijon, lequel nous a présenté un enfant du sexe masculin, né le six septembre, à neuf heures du soir, en son domicile, de son mariage contracté à Arnay-le-Duc, le neuf mars mil huit cent quatre vingt-cinq avec Bouley, Jeanne, âgée de trente-un ans, couturière, domiciliée avec lui et auquel enfant il a déclaré donner le prénom de Charles. Lesdites présentation et déclaration faites en présence des sieurs Richoux, Jean-Baptiste-Edouard, âgé de cinquante-trois ans, marchand de mercerie et Leneuf, Jean-Marie-Louis âgé de quarante-six ans, ouvrier en limes, tous deux domicilié à Arnay-le-Duc et ont le père de l’enfant et les témoins signé avec nous le présent acte de naissance après lecture.
[Signatures] Moreau / Richoux / J.M. Leneuf / A. Vollot
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Fiche matricule
Nom : Moreau
Prénoms : Charles
Surnoms : _
Numéro matricule du recrutement : 1124
Classe de mobilisation : 1912
État civil :
Né le 6 septembre 1892, à Arnay-le-Duc, canton de Arnay-le-Duc, département de Côte-d’Or, résidant à Arnay-le-Duc, canton d‘Arnay-le-Duc, département de Côte-d’Or, profession de ferblantier-zingueur, fils de feu Charles et de Bouley Jeanne domiciliés à Arnay-le-Duc, canton d‘Arnay-le-Duc, département de Côte-d’Or.
Marié à _.
Signalement :
Cheveux : Châtain foncésYeux : bleus
Front : Inclinaison – hauteur – largeur : Moyen
Nez : Dos – Base – Hauteur – Saillie – Largeur cave
Visage : _
Renseignemets physionomiques complémentaires : _
Taille : 1 mètre _ centimètres.
Taille rectifiée : 1 m. _ cent.
Marques particulières : _
Degré d’instruction générale : 2.
Décision du conseil de révision et motifs :
Inscrit sous le n°80 de la liste du canton d’Arnay-le-Duc.
Classé dans la 1e partie de la liste en 1913. Bon absent.
Classé dans la _e partie de la liste en 19_
Corps d’affectation / Numéros au contrôle spécial – matricule ou au répertoire
Dans l’armée active : 27e Régiment d’Infanterie – 4544
Disponibilité et réserve de l’armée active : _
Armée territoriale et sa réserve : _
Détail des services et mutations diverses.
Incorporé à compter du 1er octobre 1913. Arrivé au corps le 1er octobre 1913. Disparu le 5 avril 1915 au combat du bois d’Ailly. Décès fixé au 5 avril 1915 par jugement déclaratif de décès rendu par le tribunal civil de Dijon le 27 janvier 1923..
Antécédents judiciaires et condamnations
Condamné le 13 février 1908 par le Tribunal correctionnel de Beaune à cinquante francs d’amende (sursis) pour coups et blessures. Condamné le 24 février 1911 par le tribunal correctionnel d’Autun à trois mois de prison et à 16 francs d’amende pour “outrages et violences à la gendarmerie”, et à 5 francs d’amende par “ivresse”.
Campagnes
Contre l’Allemagne du 2 août 1914 au 5 avril 1915.
Blessures, citations, décorations, etc.
_.
Localités successives habitées
par suite de changements de domicile ou de résidence
Dates / Communes / Subdivisions de région / D : Domicile, R : Résidence
_.
Périodes d’exercices
Réserve : 1re dans le_, du _ au _.
– 2e dans le_, du _ au _.
– Supplémentaire dans le_, du _ au _.
Armée territoriale : 1re dans le_, du _ au _.
– Supplémentaire dans le_, du _ au _.
Spéciales aux hommes du service de garde des voies de communication :_.
Époque à laquelle l’homme doit passer dans :
La réserve de l’armée active :_
L’armée territoriale :_
La réserve de l’armée territoriale : _
Date de la libération du service militaire :_
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Journal des marches et opérations du 27e régiment d’infanterie
Le bois d’Ailly. Un nom qui symbolise la dureté et l’horreur qui débouchent de la guerre de position, tant chez les Français que chez les Allemands. En septembre 1914, les Allemands se dirigent à toute allure sur Verdun, avant d’être arrêtés. Mais ils parviennent à s’enfoncer sur une vingtaine de kilomètres et prennent la ville de garnison Saint-Mihiel. De Pont-à-Mousson à Saint-Mihiel, un saillant se forme dans les positions. Les bois d’Ailly, Brûlé, Mullot, de la Vaux-Fery, sont des lieux devenus célèbres dans ce secteur souvent appelé « d’Apremont », entre Apremont-la-Forêt et Saint-Mihiel, sur la rive droite de la Meuse.
Carte d’état-major du 8e corps d’armée présentant les positions du bois d’Ailly à l’hiver 1915 (1).
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Le 8e corps d’armée, auquel le 27e régiment d’infanterie appartient à cette époque, arrive dans ce secteur en janvier 1915. Il y reste jusqu’en septembre. Les Français, bien qu’ayant contre-attaqué à plusieurs reprises, ne parviennent à faire reculer l’armée impériale, et les deux adversaires s’enterrent dans des tranchées qui forment un réseau de plus en plus profond et complexe. Les tranchées françaises et allemandes sont, par endroit, très proches. Seuls quelques mètres séparent les ennemis. C’est une véritable guerre de tranchées, et à l’artillerie à proprement parler s’ajoutent les lancés de grenades et tirs de mortiers de tranchées quotidiens. Les tranchées de première ligne sont tellement proches que les soldats doivent constamment garder la tête baissée et être les plus silencieux possible. Il suffit d’une étourderie pour qu’un soldat signe son arrêt de mort. En revanche, certaines tranchées sont profondes, ponctuées d’abris. Le 1 février, après Apremont, le 27e régiment monte au bois d’Ailly même. De bois, il ne reste que le nom. Ailly et le secteur est transformé en un paysage presque lunaire, les trous d’obus et les tranchées martyrisent ce sol encore vert quelques mois auparavant.
Bois d’Ailly. (Forêt d’Apremont. Meuse). Les lignes allemandes (et la cote 284) [Images Défense](2).
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Les bataillons font des gardes en première ligne de douze jours, avant d’être relevés. C’est le calme presque complet pendant deux mois. Mis à part les patrouilles, grenades et obus réguliers, aucun des deux camps n’attaquent véritablement l’autre. Cela change au début du mois d’avril. La rumeur court parmi les hommes, une grande offensive doit avoir lieu dans quelques jours pour refluer les Allemands hors du saillant. Cette attaque commence le 5 avril, et transforme le bois en charnier. C’est le 1er bataillon du régiment qui y participe, ce qui laisse supposer que le soldat Moreau appartient à ce bataillon.
Entrée du 5 avril 1915 :
5 avril
Le régiment occupe les mêmes emplacements que la veille.
Le 1er Bataillon était depuis deux jours tenu sur le pied d’alerte pour prendre part, de concert avec un bataillon du 56e, à l’enlèvement des tranchées du Bois d’Ailly.
Le 4 avril il recevait l’ordre du Lieutenant-Colonel Duchet du 56e commandant l’attaque formant la pièce 269 du dossier.
Le 4 avril à 21h30 le chef de bataillon recevait le renseignement que l’attaque était fixée pour le lendemain 5 à midi précises. Les compagnies devaient être à leur place de combat pour 11h45.
Les dispositions préparatoires étaient réglées par l’ordre ci-joint du chef de Bataillon (pièce n°270) ; la mission de chaque compagnie, les formations à prendre pour l’attaque y sont contenues ; depuis le 4 avril les gradés des unités avaient reconnu leurs emplacements de départ, leurs points d’attaque particuliers et la nature des défenses ennemies qu’ils auraient à enlever.
Les Compagnies partent de la Croix Saint Jean ; la 3e et la 2e passent par le boyau du Génie ; la 4e et la 1ère par le boyau du 27e pour aller prendre leurs emplacements (1).
- Le 2e bataillon, revenu de Commercy installe 2 compagnies (5e et 6e compagnies) à La Commanderie, 7e au Ravin, 8e au réduit de la Croix St. Jean.
11h40
A 11h40 elles y sont arrivées. Pendant le tir d’efficacité de l’artillerie, ouvert à 11h50 et l’explosion des sapes ; les premiers échelons des 4e et 3e compagnies sont collés à notre parapet de 1ère ligne, les autres échelons sont à l’abri en T2 et T3, la 1ère compagnie en T3, la 2e compagnie à la disposition du Lieutenant-Colonel Duchet dans la sape Y.
12h
À midi précises les mines françaises explosent.
12h2’
Les premiers échelons franchissent du même élan le parapet et se jettent à la baïonnette sur la première tranchée allemande avec un entrain admirable. Les deuxièmes échelons se sont portés immédiatement à leurs gradins et échelles de franchissement et se lancent en avant.
L’attaque réussit, la première ligne est occupée sur le front d’attaque du bataillon, le drapeau rouge apparaît vers le point A.
12h5’
Les 3èmes échelons partent à midi 5, traversent la 1ère ligne ennemie, puis la 2e et abordent la 3e, l’élan est tel que les 4èmes échelons montent d’eux-mêmes sur le parapet de notre tranchée de départ et leurs chefs ne peuvent résister à l’ardeur qui les anime, tout le monde part pour aller se jeter sur la 3e tranchée allemande.
12h 15
À midi 15 un poste téléphonique volant relie le chef de bataillon à la première ligne ennemie du polygone* 7.
Le débouché de la compagnie Mervoyer (4e compagnie) d’aile droite s’est effectué dans des conditions défavorables sous le feu de mitrailleuses ennemies placées sur sa droite dans des positions de flanquement.
Le Chef de bataillon demande à l’artillerie de tirer sur le saillant Beaulieu et à un mortier de 15 d’attaquer le point P.
La compagnie Mervoyer doit soutenir un combat très dur pour enlever les tranchées constituant le polygone 7, l’attaque est faite à coups d’explosifs et à la baïonnette.
Une mitrailleuse ennemie installée en A est prise après que les servants ont été tués.
À 13h25, tout le polygone est à nous. Des barrages sont organisés en A et au sommet Nord-Est du pentagone.
1 mitrailleuse se met en batterie en A. La 2ème est portée provisoirement au sommet Nord du pentagone.
À 12h24 la 3e compagnie est tout entière dans la 3e ligne allemande, sauf quelques éléments, qui travaillent à porter 1ère et 2e lignes des défenseurs qui y sont tombés.
Les sapeurs du Génie qui avaient accompagné les colonnes d’attaque, après la recherche des fils conducteurs des mines allemandes aident à l’organisation des première et deuxième ligne.
La 3e compagnie (Capitaine Bolle) organise la 3e ligne et retourne le parapet. Le Sous-Lieutenant Perrot avec quelques hommes se porte en avant de la patte d’oie du point 4 vers le point 5, à une trentaine de mètres, organise un barrage et utilise à droite et à gauche les entonnoirs produits par les obus.
A 13 heures la Compagnie Bolle et la Compagnie Mervoyer sont en liaison étroite. Les chefs de section d’aile intérieure se mettent en relation.
Le front de la compagnie Bole est en outre couvert par une petite fraction déployée, utilisant les trois d’obus. Des créneaux sont portés à la 3e compagnie, des grenades à la 4e compagnie.
À 13 heures 2 sections de la 1e compagnie (Lieutenant Chaumont) sont envoyées, l’une à la compagnie Mervoyer sur la demande de cet officier qui lutte constamment contre les contre-attaques faites par l’ennemi à sa droite ; l’autre section dans les tranchées de 2 ligne vers N.
A 13h15 une 3e section de la compagnie Chaumont est envoyée en 2e ligne allemande prête à soutenir la compagnie Mervoyer qui souffre beaucoup ds feux de flanc de l’ennemi, deux chefs de section sont hors de combat ;
De ce côté l’organisation de la position conquise s’effectue néanmoins. À 13h15 une mitrailleuse est installée à l’angle Nord-Est du pentagone.
Vers la même heure la dernière section de la 1ère compagnie s’est portée en avant.
13h50
À 13h50 le Lieutenant-Colonel Duchet fait connaître au Chef de Bataillon, qu’il met à la disposition du chef de bataillon une compagnie du 10e régiment d’infanterie pour consolider ses positions et élargir le succès.
Carte présente dans le JMO du 27e régiment d’infanterie à la date du 5 avril 1915, présentant ce qui semble être le Polygone 7 mentionné [vue 79].
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14h
À 14 heures le chef de bataillon voit du parapet de G4 des fractions du 56e qui se replient lentement vers la gauche de la 3e ligne allemande et s’arrêtent dans cette tranchée.
14h30
À 14h30 des coups de fusils se font entendre dans la direction et au-delà de 6.
À ce moment, tout le bataillon est engagé et occupe les positions suivantes, en y comprenant celles indiquées par le Sous-Lieutenant Gueneau, après le combat, pour la 2e compagnie qui était aux ordres du Lieutenant-Colonel Duchet. Croquis ci-contre.
Quelques minutes plus tard le mouvement de repli s’accentue devant l’avance des Allemands et gagne les éléments autour du point 4.
Des petites fractions de la 3e compagnie et de la 2e compagnie qui avaient progressé vers le Nord-Est apparaissent faisant le coup de feu contre les Allemands qui contre-attaquent.
En même temps, des feux de mitrailleuses provenant des environs du point P et du saillant Beaulieu prennent de flanc la compagnie Mervoyer qui est fortement attaquée par des engins explosifs sur son flanc droit. Cette compagnie fortement éprouvée par le combat qu’elle soutient depuis midi et par la perte de beaucoup de ses gradés, dont le Lieutenant Mervoyer, se replie lorsqu’elle voit le mouvement en arrière des fractions de gauche. La ligne 6-4 est abandonnée ainsi que 4-7 ; les occupants de la 2e ligne se replient dans la première, puis dans nos lignes vers 15h30.
15h40
À 15h40 une Compagnie (4/10) du 10e d’Infanterie (Capitaine Boillot) arrivée à 15 heures à la disposition du Chef de Bataillon reçoit l’ordre d’enlever avec 2 sections les tranchées du pentagone et avec une section et demie de réoccuper les lignes ennemies sur le front B-E.
15h55
L’attaque sur le pentagone se déclanche à 15h55 sous un feu violent venant du saillant Beaulieu, elle est conduite par le Capitaine Boillot qui réoccupe la tranchée E-A après en avoir chassé l’ennemi.
16h20
La contre-attaque sur le front B-E débouche à 16 heures 20 et les fractions de la 4/10 se jettent dans la tranchée ennemie.
Le mouvement est appuyé par la section de la 3e/27 (Sous-Lieutenant Perrot qui, bien que blessé, entrâine à nouveau ses hommes).
La ½ section restante du 10e est portée en renfort au capitaine Boillot dont les pertes sont sérieures.
Les Compagnies du 1/27 (1er bataillon du 27e d’infanterie) ont été reconstituées en partie sur T3-T4, les fortes pertes subies par les cadres rendent l’opération laborieuse.
À partir du moment où elle a pénétré dans le pentagone, la compagnie Boillot cherche à progresser les tranchées remontant vers le point 7. Elle gagne pied à pied sur e-7 quelques mètres de terrain.
Une mitrailleuse du 27e d’infanterie lui est envoyée.
Le Capitaine Boillot la fait placer la tranchée e-7, une deuxième en A.
21h40
À 21h40 ordre du Lieutenant-Colonel Duchet de faire exécuter par la 8e compagnie du 27e d’infanterie mise à la disposition du chef de bataillon, une attaque ayant pour objet de s’emparer par surprise de la face Nord-Ouest du quadrilatère 7 et de la portion des tranchées de la 2e ligne allemande entre 7 et la tranchée B-C et d’organiser immédiatement le terrain conquis.
22h30
La 8e compagnie du 27e d’infanterie à 22h30, est maintenue dans le boyau du Génie en attendant qu’elle soit munie des explosifs, outils et sacs à terre qui lui font défaut.
La 8e compagnie du 27e d’infanterie (Lieutenant Pinguet) reçoit l’ordre d’attaque ci-joint (pièce 273).
Les pertes allemandes ont été très sérieuses pendant l’attaque du 1er bataillon.
Nos hommes ont lutté avec acharnement dans l’attaque des tranchées où de nombreux ennemies s’étaient réfugiés dans leurs abris-cavernes. Ceux qui en étaient sortis ont tous été tués à l’arme blanche, les autres à coup de grenades à palette.
31 prisonniers ont été ramenés ainsi qu’une mitrailleuse allemande, 2 mitrailleuses françaises et un lance-bombe. Les pertes du 1er bataillon du 27e d’infanterie s’élèvent à :
2 officiers tués : M.M. Chamont sous-lieutenant de réserve, Mervoyer lieutenant de réserve.
2 officiers blessés : M.M. Perrot sous-lieutenant d’active (1), Letorey sous-lieutenant de réserve.
1 officier disparu : M. le Lieutenant Grandjean d’active (2).
6 sous-officiers tués – 22 blessés – 2 disparus.
24 hommes de troupe tuées – 149 blessés – 42 disparus.
Les pertes de la journée s’élèvent à :
Tués | Blessés | Disparus | |
Officiers : | 2 | 2 | 1 |
Sous-officiers | 8 | 24 | 2 |
Troupe | 27 | 161 | 45 |
- Mort de ses blessures à l’Hôpital de Commercy le 13 avril 1915.
- Dont le corps fut retrouvé deux jours après, percé de coups de baïonnette.
* Polygone, pentagone, quadrilatère correspondent aux positions renforcées allemandes au sein des tranchées (comme sur la carte ci-dessus).
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Décès
N°6
Transcription de l’arrêt sur requête
déclaratif de décès concernant
Charles Moreau
‘’Mort pour la France’’
le 5 avril 1915
Du 27 janvier 1923
—
Vu la signification à nous faite le vingt-sept janvier mil neuf cent vingt trois de l’expédition d’un arrêt sur requête rendu par la cour d’appel de Dijon le quinze janvier mil neuf cent-vingt-trois, nous transcrivons ici le dispositif dudit arrêt :
Par ces motifs : la cour, vu l’article neuf de la loi du 25 juin 1919 ; faisant droit à l’appel de monsieur le Procureur général et réformant le jugement du vingt quatre novembre mil neuf cent vingt deux, par lequel le Tribunal civil de Beaune a maintenu sa première décision de rejet ; dit que plus de deux années s’étant écoulées depuis la disparition constatée à la suite d’un fait de guerre, le décès de Moreau Charles, soldat au vingt septième régiment d’Infanterie, fils de Charles et de Bouley Jeanne, né le six septembre mil huit cent-quatre vingt douze, à Arnay-le-Duc (Côte-d’Or) est constant, et est survenu le cinq avril mil neuf cent quinze. Dit que ce militaire est « Mort pour la France », dit que conformément à l’article quatre vingt douze du code civil, modifié par la loi du vingt novembre mil neuf cent dix neuf, le dispositif de l’arrêt déclaratif de décès sera transcrit à sa date sur les registres de l’Etat civil de la commune d’Arnay-le-Duc. Dit également que mention de l’arrêt et de sa transcription sera faite à la suite de la table de l’année du décès, tant sur le registre de l’Etat civil d’Arnay-le-Duc que sur celui qui est déposé au greffe du Tribunal civil de Beaune ; dit que le présent arrêt tiendra lieu d’acte d’état civil. Ordonne que le présent arrêt sera visé pour timbre et enregistré gratis. Ainsi jugé et prononcé en audience publique de la cour d’appel de Dijon, tenu le lundi quinze janvier mil neuf cent vingt trois, par la chambre civile où siégeaient messieurs Vieillard Baron, chevalier de la légion d’Honneur, Premier Président, Georges, doyen, [Moettesal ?], Gareau, Druhen, conseillers. Étaient présents : messieurs Rey, substitut du Procureur Général, et Goux, commis greffier. Signé : Vieillard Baron & Goux. Transcrit le vingt sept janvier mil neuf cent vingt-trois, quatorze heures, par nous Georges, officier de l’Instruction Publique, maire d’Arnay-le-Duc.
[Signature] Georges
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Données additionnelles
En 1911, la famille Moreau réside rue du faubourg Dijon. Elle est composée de la mère, veuve, et des frères et sœur de Charles : Georges, Jules et Marthe. Bien que domicilié légalement à Arnay-le-Duc, Charles n’y est pas recensé car il purge certainement sa peine de trois mois de prison à ce moment.
Un roman autobiographique écrit par M. Godard, qui évoque notamment sa jeunesse arnétoise dans les années 50 et dont les lignes suivantes nous sont transmises par son fils, M. Didier Godard, raconte une terrible journée d’été vécue par une certaine Marie Marbeuf :
[…] Un jour d’été, alors qu’elle était dans son jardin en train de soigner ses fleurs, elle aperçut le facteur qui gravissait péniblement le chemin desservant le quartier pauvre d’Arnay qu’elle habitait. Et ce fut la révolte.
Non, s’était-elle écriée, non, je ne veux pas. Ce n’est pas vrai.
Elle avait compris que le facteur apportait la nouvelle de la mort au front de son troisième fils. A partir de ce jour-là Marie Marbeuf fut bizarre et le reste jusqu’à sa mort. Elle secouait sans cesse la tête en disant : « Non, non. » Elle continua tout de même à tenir sa maison mais elle parlait à ses vaches comme elle eût parlé à ses fils.
(3)
Il ne fait nul doute que Marie Marbeuf est en réalité Jeanne Bouley, veuve Moreau. En octobre 1916, une funeste lettre, la première, lui apprend le décès de son fils Robert, mort le 14 août. Durant l’été 1919, le facteur gravit le chemin de sa maison pour lui annoncer la disparition de Georges, mort de maladie en lointaine Croatie, un mois après l’armistice. Le récit de M. Godard fait certainement référence à cet épisode, puisqu’il est question de l’été. Madame Bouley savait-elle, en 1919, que son cher Charles, dont le décès n’est pas encore officiel, est lui-aussi mort depuis 1915 ? Des camarades de Charles lui ont-ils écrit, ou sont venus la voir au détour d’une permission ? Espérait-elle qu’il soit encore en vie, peut-être interné dans un hôpital ou asile ? Il lui faut douloureusement attendre jusqu’en 1923 pour que Jeanne Bouley soit officiellement reconnue comme la mère de trois enfants morts pour la France. En 1922, le tribunal de Beaune rend un jugement refusant pour la seconde fois la reconnaissance du décès de Charles. Disparu lors de l’offensive du 5 avril 1915, son corps n’a jamais été retrouvé, ou du moins identifié. La loi relative aux militaires, marins et civils disparus pendant la durée des hostilités du 25 juin 1919 permet au ministère public et à toute personne de se pourvoir devant le tribunal pour faire reconnaît un décès « lorsqu’un militaire ou un marin aura, dans la période comprise entre le 2 août 1914 et la date indiquée par le décret fixant la fin des hostilités, cessé de paraître à son corps et au lieu de son domicile ou de sa réside, et que son décès n’aura pas été régulièrement constaté » (article 1er de la loi)(3). C’est peut-être la famille de Charles qui se pourvoit devant la cour d’appel de Dijon après un second refus du tribunal de Beaune.
Le corps de Charles Moreau est peut-être toujours enfoui sous le sol du bois d’Ailly. Mais il est également possible que son corps soit entièrement « détruit » par fait de guerre, ou que ses restes non-identifiés soient dans un ossuaire.
Charles Moreau sert dans le même régiment que l’abbé Louis Vatan, Édouard Narcy, Henri Carlier et Claude Guyot. Alors sergent, Claude Guyot, futur maire d’Arnay-le-Duc, est blessé le 5 avril, jour de la disparition de Charles Moreau.
Carte
Sources
- A. D. de la Côte-d’Or, état civil numérisé, Arnay-le-Duc 1885 – 1892 (FRAD021EC 26/035), Moreau Charles, n°97, 1892, vue 549/585.
- A.D. de la Côte-d’Or, recrutement militaire (1867-1940), classe 1912, bureau d’Auxonne (R 2488), vue 216/449.
- S.H.D, Mémoire des Hommes, Journaux des marches et opérations des corps de troupe, 27e régiment d’infanterie, 5 août 1914 – 20 mai 1915 (26 N 601/1), vues 78-83/110.
- A.D. de la Côte-d’Or, état civil numérisé, Arnay-le-Duc 1921 – 1926 (FRAD021EC 26/042), Moreau Charles (transcription de jugement), n°6, 1923, vues 135-36/304.
- (1) (s.d.), « Carte d’état-major du 8e corps d’armée présentant les positions du bois d’Ailly à l’hiver 1915 » in Morthomme (en Allemand) [En ligne] (consulté le 28 juin 2022).
- (2) Machard, Ernest Pierre Henri Miguel (1915), « Bois d’Ailly. (Forêt d’Apremont. Meuse). Les lignes allemandes (et la cote 284). [Légende d’origine] » in Images Défense (SPA 8 C 1131) [En ligne] (consulté le 28 juin 2022).
- (3) Ces lignes ont été transmises par M. Didier Godard, d’après le manuscrit du roman de son père.
- (4) (27 juin 1919), Journal officiel de la République française. Lois et décrets, p. 6590 [En ligne] (consulté le 28 juin 2022).