DENNINGER Julien

DENNINGER Julien

¤ 25 juin 1892 à Arnay-le-Duc
† 25 septembre 1915 à Jonchery-sur-Suippe (Marne)
2e classe – 60e régiment d’infanterie – 23 ans
Suites de blessures de guerre
Mort pour la France
Croix de guerre avec étoile de bronze

“Soldats du 60e, vous allez avoir des journées formidables.”
Lieutenant-colonel Eugène Mittelhauser

Acte de naissance

N°66

Acte de Naissance
de
Denninger, Lucien*
(légitime)

Du 26 juin 1892

L’an mil huit cent quatre vingt douze le vingt six juin à l’heure de trois du soir, heure légale, pardevant Nous, Vollot, Antoine, François, maire, officier de l’état civil de la ville d’Arnay-le-Duc, chef-lieu de canton, arrondissement de Beaune, département de la Côte-d’Or. A comparu le sieur Denninger, Émile-Eugène, âgé de trente-huit ans, ouvrier en limes, domicilié à Arnay-le-Duc, rue de Dijon, lequel nous a présenté un enfant du sexe masculin, né (hier) hier à cinq du soir, en son domicile, de son mariage contracté à Arnay-le-Duc le vingt-deux février mil huit cent soixante dix-neuf avec Moreau, Marie-Honorine, sans profession domiciliée avec lui et auquel enfant il a déclaré donner le prénom de Julien. Lesdites présentation et déclaration faites en présence des sieurs Perrotin, Louis, âgé de trente-six ans, et Ballet, Victor, âgé de trente-huit ans, tous deux ouvriers en limes, domiciliés à Arnay-le-Duc et ont le père de l’enfant et les deux témoins signé avec nous le présent acte de naissance après lecture.
[Signatures] Denninger / Ballet Victor / L. Perrotin / A. Vollot

* L’enfant est prénommé Lucien en marge, mais bien Julien dans le corps de texte. Il s’agit d’une erreur non rectifiée du secrétaire de mairie.

[Lien vers le document original]

Fiche matricule

Décédé

Nom : Denninger
Prénoms : Julien
Surnoms : _
Numéro matricule du recrutement : 1080
Classe de mobilisation : 1912


État civil :

Né le 25 juin 1892, à Arnay-le-Duc, canton d’Arnay-le-Duc, département de Côte-d’Or, résidant à Saint-Prix, canton d‘Arnay-le-Duc, département de Côte-d’Or, profession d’ouvrier en limes, fils d‘Emile-Eugène et de Moreau Marie-Honorine domiciliés à Saint-Prix, canton d‘Arnay-le-Duc, département de Côte-d’Or.

Marié à _.


Signalement :

Cheveux : Châtains
Yeux : idem
Front : Inclinaison – Hauteur – Largeur : Moyen
Nez : Dos – Base – Hauteur – Saillie – Largeur : moyen
Visage : _
Renseignements physionomiques complémentaires : _
Taille : 1 mètre 63 centimètres.
Taille rectifiée :
1 m. 64 cent.
Marques particulières : cicatrice sur les arcades sourcilières
Degré d’instruction générale : 3


Décision du conseil de révision et motifs :

.

Inscrit sous le n°35 de la liste du canton d’Arnay-le-Duc
Classé dans la 5e partie de la liste en 1913. Ajourné à un an pour “faiblesse”.
Classé dans la _e partie de la liste en 19_Exempté en 1914 pour “faiblesse irrémédiable”.


Corps d’affectation / Numéros au contrôle spécial – matricule ou au répertoire

Dans l’armée active : 42e régiment d’Infanterie – 10125
– 60e régiment d’infanterie – 12367

Disponibilité et réserve de l’armée active : _
Armée territoriale et sa réserve : _


Détail des services et mutations diverses.

Classé dans le service armé par décision du conseil de Révision de la Côte-d’Or d’octobre 1914 (Décret du 9 septembre 1914 – Arrêté du 15 septembre 1914).
Incorporé à compter du 27 octobre 1914. Arrivé au corps ledit jour. Soldat de 2e classe le 27 octobre 1914. Passé au 60e Régiment d’Infanterie en date du 23 janvier 1915 par décision du général commandant la 7e Région en date du 19 janvier 1915. Passé à la _ compagnie le 24 janvier 1915. Tué à l’ennemi le 25 septembre 1915. Jonchery (Avis ministériel de décès du 24 novembre 1915 DW.5374)
.


Antécédents judiciaires et condamnations

_.

Campagnes

Contre l’Allemagne du 27 octobre 1914 au 25 septembre 1915.

Blessures, citations, décorations, etc.

_.


Localités successives habitées
par suite de changements de domicile ou de résidence

Dates / Communes / Subdivisions de région / D : Domicile, R : Résidence

_.


Périodes d’exercices

Réserve : 1re dans le_, du _ au _.
– 2e dans le_, du _ au _.
– Supplémentaire dans le_, du _ au _.
Armée territoriale : 1re dans le_, du _ au _.
– Supplémentaire dans le_, du _ au _.
Spéciales aux hommes du service de garde des voies de communication :_.


Époque à laquelle l’homme doit passer dans :

La réserve de l’armée active :
L’armée territoriale :
La réserve de l’armée territoriale :
Date de la libération du service militaire :

Pas de dossier 20.11.1958

[Lien vers le document original]

Journal des marches et opérations du 60e régiment d’infanterie

Le 60e régiment d’infanterie, caserné à Besançon, prend en 1917 le surnom d’As de cœur. En septembre 1917, le général Philipot commandant la 14e division d’infanterie, évoque dans un ordre son admiration pour les hommes de sa division. « Merci mes enfants, bravo mes as ! », écrit-il, alors que les quatre régiments d’infanterie de la division obtiennent le droit au port de la fourragère. Le 60e régiment, dès lors, choisit l’as de cœur, le 35e l’as de trèfle, le 42e l’as de carreau, et, enfin le 44e l’as de pique. C’est la division des as, dont les 4 régiments d’infanterie s’illustrent aux yeux des généraux tout au long du conflit.

Le soldat Julien Denninger rejoint le régiment en janvier 1915. Il vient de finir ses classes, certainement avec le 42e régiment d’infanterie. Il y a quelques mois encore, il semblait possible que Julien Denninger échappe à la guerre, puisqu’il est d’abord ajourné, puis exempté en 1914 pour « faiblesse irrémédiable ». Après l’hécatombe des premières de semaines de guerre, le gouvernement cherche à « récupérer » des soldats parmi les hommes exemptés, ajournés ou versés dans les services auxiliaires. Le décret du 9 septembre 1914 est une des premières mesures de récupération. Cela permet d’apporter au front des hommes « frais » mais beaucoup d’entre eux ont des dispositions physiques ou mentales plus faibles que leurs camarades. Julien Denninger appartient à la 8e compagnie du 2e bataillon du régiment.

À la fin du mois d’août 1915, le 21, le régiment arrive près du village de Suippes, dans la Marne. Les 2 959 soldats et officiers du régiment, comptant un grand nombre de Doubiens dans ses rangs découvrent un secteur tendu et bien tenu par les Allemands. Jonchery-sur-Suippes, Saint-Hilaire-le-Grand, Souain-Perthes-lès-Hurlus, sont des villages endommagés par les combats de 1914 mais ils ne sont pas encore des symboles de la destruction et des horreurs de la guerre. Organisés sur trois lignes défenses, les Allemands ont creusé, aménagé et construit un réseau complexe de tranchées équipées par endroits de points de résistance qui ressemblent à des places fortes. La première ligne de défense est une suite de quatre lignes de tranchées, protégées par des fortins. Derrière, des bois aménagés, puis une deuxième ligne de défense, puis une troisième.

Fin septembre 1915, les Allemands ne sont pas dupes et reconnaissent qu’une offensive majeure se prépare. Majeure, en effet, puisqu’elle doit se dérouler sur tout le front de Champagne. Parallèlement, Français et Britanniques se préparent à attaquer conjointement dans le front de l’Artois. C’est le grand plan du maréchal Joffre. Il doit permettre de repousser les Allemands grâce à un avantage numérique et à une puissance d’artillerie supérieure.

La météo n’est guère clémente. Il pleut beaucoup. En amont de l’offensive, les régiments français se préparent. Il faut creuser, toujours creuser, pour que les lignes françaises puissent être aussi proches des lignes allemandes que possible. Le 60e régiment perd une soixantaine de soldats pendant la réalisation de ces travaux. Le 22 septembre, J-3, les canons français débutent leur déluge d’acier pour saper le moral de l’adversaire, détruire ses défenses dont les fils barbelés, et tuer.

Le moral est bon au haut-commandement, malgré la météo, les préparatifs sont tellement poussés qu’il semble difficilement envisageable que l’offensive en Champagne ne puisse réussir. Les soldats du 60e régiment d’infanterie sont réconfortés par l’arrivée des casques Adrian qui offrent une meilleure protection face aux shrapnells et autres projectiles. La veille de l’offensive, le commandant du régiment, le lieutenant- colonel Eugène Mittelhauser, s’adresse à ses hommes : « Vous allez voir des journées formidables. La France, après de longs mois de recueillement, a préparé un effort qui soit être décisif, et vous avez l’honneur d’être en première ligne pour l’attaque générale qui va se produire »(1). Le lendemain débute une journée formidable :

Entrée du 25 septembre 1915 :

25 septembre 1915
En exécution des ordres reçus du commandement et conformément à l’ordre d’attaque donné par le lieutenant-colonel Mittelhauser en date du 22 septembre 1915, le 60ème régiment d’infanterie attaque à 9H15 les positions allemandes.
L’ordre d’attaque était le suivant :
I) Objectif d’attaque de la 27e Brigade :les hauteurs qui dominent la vallée de la Py au Sud de Sainte-Marie-à-Py entre la cote 171 et le bois Chevron.
II) Limite des zones d’action :
a) Entre le 3ème régiment de zouaves de marche et le 60ème régiment d’infanterie : Bois II (exclus), corne Sud-Est et lisière Est du Bois de la Raquette, cote 170, cote 171, cote 115 (Sud-Ouest de Sainte-Marie).
b) Entre le 44ème et le 60ème régiment d’infanterie, le boyau Namur (au 60ème régiment) la corne Sud-Est et la lisière Est du bois 170, la lisière E du bois M., et le point Est de la tranchée ennemie du bois Chevron, à 200 m. à l’Ouest de la bifurcation des pistes directes de Souain à Saint-Souplet et à Sainte-Marie-à-Py.
III) Dispositif d’attaque :
Les 3ème et 2ème bataillons échelonnés en profondeurs attaqueront sur 3 lignes. La 1ère ligne sous le commandement du commandant Devaut, comprendre 2 vagues d’assaut. Cette ligne sera formée par le 3ème bataillon renforcé par la compagnie des sapeurs du 60ème (lieutenant Pétrement), par 2 groupes de sapeurs du génie (compagnie 7/1) et par la section de mitrailleuses du sous-lieutenant Courtot.
La 3ème vague sous le commandement du commandant Peyrotte, comprenant 2 compagnies du 2ème bataillon, 2 groupes de sapeurs du génie, et la section de mitrailleuses du sous-lieutenant Boudot forme la 2ème ligne.
La 4ème vague comprenant 2 compagnies du 2ème bataillon, la réserve des sapeurs du génie (lieutenant Tournuaire), le compagnie de mitrailleuses réduite à 2 sections (capitaine Magnien) formera la 3ème ligne.
IV) Missions : Le 3ème bataillon franchissant la 1ère ligne ennemie aura pour objectif immédiat la 2ème ligne ennemie qu’il enlèvera d’un seul bond. La 2ème ligne ennemie enlevée, le 3ème bataillon prendra comme objectif, la 3ème ligne devant la lisière Ouest du bois 168.
L’axe de sa progression est jalonnée par les repères : 202-1541, corne Sud-Ouest du bois 168 et cote 139.
Les deux 1ères vagues éviteront devant le saillant C l’épi des entonnoirs allemands pour se réunir sur la première ligne vers le point 202. Une fraction de la 2ème vague, spécialement désignée et échelonnée, aura mission de nettoyer cet au passage.
Le 2ème ligne partira immédiatement derrière les 2 premières vagues, elle a pour mission de renforcer la 1ère ligne et d’en protéger éventuellement les flancs.
La 2ème ligne, réserve du régiment recevra les ordres directs du lieutenant commandant le régiment.
V) Liaisons : la liaison avec le 3ème zouaves sera assurée par le 3ème bataillon ; la liaison avec le 44ème sur le boyau Namur sera faite par les éléments de droite de la 2ème ligne, jusqu’à l’entrée en ligne du 1er bataillon du 60ème, réserve de Brigade. Les liaisons téléphoniques font l’objet de l’instruction particulière ci-jointe.
VI) Artillerie : les missions de l’artillerie dans le secteur du 27ème brigade ont fait l’objet d’une communication verbale.
VII) Le lieutenant-colonel marchera avec le drapeau au centre de la 4ème vague.
À cet ordre était joint une instruction du médecin-chef Mr. Héron de Villefosse au sujet de l’organisation du service de santé et une instruction du colonel au sujet de la liaison téléphonique. Les dispositions sont prises pour qu’au moment de l’attaque les équipes de téléphonistes d’infanterie et d’artillerie suivent les différentes vagues et installent des lignes volantes pour l’obtention de liaisons immédiats et permanents vers le commandement et vers l’artillerie. Malgré une préparation d’artillerie intense exécutée justement et saluée par un tir violent d’infanterie, de minenwerfer* et de mitrailleuses placées au Sud du point 202, aux environs de 140 et au Nord du point 230, mitraillant les colonnes d’assaut de face et de flanc.
Malgré ce tir, les trois  premières vagues (commandant Davaut, commandant Peyrotte) pénètrent dans la 1ère ligne allemande, puis dans la ligne de soutien. La 3ème vague continue sans désemparer sur la tranchée de 2ème ligne qu’elle traverse. Les éléments [ ?? ??] sont obligés de s’arrêter au Nord du Bois B.C. par suite de tir de notre propre artillerie et de venir à la tranchée de 2ème ligne ennemie occupée encore par de nombreux allemands et dans laquelle s’engage une violente lutte de grenades.
Pendant ce temps les éléments restés dans la 1ère ligne et la ligne de soutien procèdent au nettoyage méthodique des différents abris et boyaux de ces lignes.
Les allemands finissent par se réfugier dans deux centres de résistance, situés à l’Est du saillant C. dont ils font faire le siège pied à pied.
Le colonel accompagné de l’état-major du régiment et suivi du drapeau et de sa garde, du commandant du 47ème d’artillerie Foncault, commande la compagnie d’appui direct ; le lieutenant Tournaire et une réserve de sapeurs du génie s’étaient portés dans les lignes ennemies avec la 3ème vague et était venu établir son poste de commandement aux environs du point 154 sur la 2ème ligne ennemie. La communication téléphonique est établie avec le commandement et avec l’artillerie.
Le colonel demande aussitôt l’envoi de renforts destinés à compenser les pertes nombreuses subies au moment de l’assaut, à [activer ?] le nettoyage des tranchées conquises de tous les éléments étrangers et à permettre la progression plus en avant.
À 14h50 le colonel adresse au commandement le message suivant :

« En l’absence de renforts, je me retranche à la lisière Sud-Ouest du bois B.c. avec une section de mitrailleuses, le commandant Peyrotte et 70 hommes. Je signale que le point que j’occupe est un remarquable observatoire jusqu’à la cote 139. »

Au début de l’action, le premier bataillon du régiment avait été réparti de la façon suivante :
1ère et 2ème compagnie sous les ordres du commandant Thénel ayant été tué, les 2ème et 4ème compagnies sont placées sous les ordres du commandant Duffet et reçoivent l’ordre, ainsi qu’un bataillon du 67ème régiment territorial, de tenir la position et de s’opposer à toute contre-attaque éventuelle de l’ennemi.
À partir du moment de son arrivée dans la 2ème ligne allemande, le Colonel regroupe autour de lui, les éléments des 1ère et 2ème compagnies qui ont pu arriver jusqu’à lui et ce qui reste des bataillons Peyrotte et Davaut, le régiment occupe à la nuit les positions suivantes :
2ème ligne ennemie du point 154 jusqu’à 153 vers l’Est, occupant en même temps le bois B.C. et en liaison avec les zouaves à l’Ouest. La liaison avec le 44ème n’a pu être établie à cause de l’occupation du massif 153-154 par l’ennemi (une section de mitrailleuses est placée à 1541, deux sections ua bois BC, une section à 153).
Pendant cette journée tant parmi les troupes allemandes assiégées dans la 1ère ligne et la ligne de soutien que dans les divers boyaux et dans la 2ème ligne, il a été fait 400 prisonniers et il a été pris 4 mitrailleuses, 4 minenwerfer et un important matériel de tranchées.
Pertes : Très nombreuses en hommes, sous-officiers et officiers (voir pièces annexes).
Troupes : Hommes : _ blessés _ morts _ disparus
                 Sous-officiers : _ blessés _ morts _ disparus
Officiers :

  • Commandant Thénel tué
  • Sous-lieutenant Boucher tué
  • Sous-lieutenant Renaud tué
  • Capitaine Marconniet tué
  • Sous-lieutenant Cotten tué
  • Capitaine Steffanacci tué
  • Lieutenant Schneider tué
  • Sous-lieutenant Donnet tué
  • Commandant Devaut tué
  • Capitaine Collilieux tué
  • Sous-lieutenant Panthier tué
  • Capitaine Delarue tué
  • Sous-lieutenant De Buyer tué
  • Sous-lieutenant Baudot blessé
  • Lieutenant Ruty blessé
  • Capitaine Bonlé blessé
  • Sous-lieutenant Sonckaert [ ?] blessé
  • Sous-lieutenant Chardenot blessé
  • Capitaine Reverchon blessé
  • Lieutenant André blessé
  • Sous-lieutenant Laurent blessé (blessé le 26)
  • Sous-lieutenant Bouchacourt blessé
  • Capitaine Bidaud (blessé)
  • Lieutenant Olivier blessé
  • Sous-lieutenant Fréret blessé
  • Sous-lieutenant Jeannin blessé

Pendant la nuit très pluvieuse comme la précédent journée, continuation de la progression dans l’ouvrage 153 par la 2ème compagnie mise à la disposition du commandant Peyrotte. Cet ouvrage finit par être occupé ainsi que les boyaux de Louvain et de Namur jusqu’à 156. Des patrouilles sont envoyées dans la direction de la 3ème ligne allemande, notamment dans le boyau de Liège et dans le boyau de Bruxelles où la liaison avec les zouaves s’établit à l’intersection du boyau d’Ypres.

* mortier de tranchée allemand Schwerer Minenwerfer.

Compte tenu de l’écriture du rédacteur, il est possible que des erreurs de transcription existent pour la liste des officiers tués et blessés. La liste nominative des pertes dans la troupe mentionnée en pièce-jointe est absente du journal des marches. Aucun nombre n’est donné car les estimations sur le terrain sont impossibles à faire, et très difficiles lors des journées suivantes puisque le total des troupes tuées, blessées et disparues s’allonge.

Photographie d’illustration de l’attaque du 25 septembre représentant des corps de soldats morts alignés en préparation de leur inhumation(2).
Avertissement : ne cliquer que si vous le souhaitez.

Malgré quelques succès ponctuels pour le 60e régiment d’infanterie, comme l’occupation d’une ligne allemande et la capture d’environ 400 prisonniers, l’offensive est plus que mitigée. Grâce à l’indexation des fiches des soldats morts pour la France, les chercheurs ont pu réévaluer le nombre de soldats tués lors des différentes journées de la guerre. Le 22 août 1914 est, dans la conscience collective, reconnu comme le plus meurtrier de l’histoire militaire française avec plus de 21 000 morts. Avec les deux offensives, en Artois et en Champagne, plus les autres fronts, environ 23 416 soldats français sont tués pendant la seule journée du 25 septembre 1915(3). Le 60e régiment d’infanterie continue à participer à l’offensive jusqu’à sa relève à la fin du mois de septembre. L’armée, en la personne du général Gouraud, salue le courage des hommes du régiment et leurs actions. Mais le prix est lourd. Le lieutenant-colonel Mittelhauser est grièvement blessé le 28 septembre. Si le régiment est relevé, c’est qu’il n’est plus en état de combattre. Le nombre d’officiers se compte sur les doigts d’une main puisque 42 sont tués ou blessés, ainsi que 1 700 sous-officiers et hommes de troupes. Partout sur le front, tant chez les Allemands, Britanniques que Français, les chiffres des pertes sont astronomiques. Quelques kilomètres carrés sont gagnés en plusieurs semaines de combats, en plus de quelques milliers de prisonniers allemands qui suffisent pour annoncer officiellement que les offensives sont des succès. À quelques 200 kilomètres du secteur où le soldat Denninger trouve la mort, près de Lens à Loos-en-Gohelle, 6 divisions britanniques (comprenant beaucoup de soldats indiens) s’élancent contre les troupes allemandes du prince Rupprecht de Bavière jusqu’au 8 octobre. C’est le premier engagement de la Nouvelle Armée britannique, composée de nombreux volontaires venus remplacés les pertes de 1914. Les Britanniques perdent 59 240 hommes, faisant de la bataille de Loos un des engagements les plus meurtriers de leur histoire. Parmi les pertes, un second-lieutenant des Irish Guards nommé John Kipling, disparu entre le 25 et le 27 septembre. John Kipling est le seul fils de l’écrivain Rudyard Kipling, connu notamment pour le Livre de la Jungle et fervent patriote. La mort de ce fils a détruit la famille Kipling, et l’écrivain s’engage en faveur de la Commonwealth War Graves Commission (l’autorité chargée de dénombrer et entretenir les tombes). Rudyard Kipling cherche la vérité sur la mort de son fils, et son corps, jusqu’à sa mort en 1936. C’est seulement en 2016 que son lieu de sépulture est confirmé.

 [Lien vers le document original]

Décès

N°3

Acte
de décès de
Denninger Julien–
Du 25 septembre 1915

Transcription du 15 février 1916

Quatrième année, septième corps d’armée, soixantième régiment d’Infanterie. L’an mil neuf cent quinze le quatorze du mois d’octobre à huit heures étant à Jonchery, près de Suippes, Marne. Acte de décès de Denninger Julien soldat de deuxième classe au soixantième régiment d’Infanterie, huitième Compagnie, immatriculé sous le numéro dix mille cent vingt-cinq, né le vingt-cinq juin mil huit cent quatre-vingt douze à Arnac canton de Arnac, département de la Côte-d’Or, domicilié en dernier à Saint-Prix, canton d’Arnay-le-Duc, département de la Côte-d’Or, Mort pour la France, décédé au champ de bataille de Jonchery, près de Suippes, Marne, le vingt-cinq du mois de septembre mil neuf cent quinze, neuf heures par suite de blessures reçues, fils de Émile Eugène et de Moreau Marie Honorine, domicilié à Saint-Prix, canton d’Arnay-le-Duc, département de la Côte-d’Or. Conformément à l’article 77 du Code Civil nous nous sommes transporté auprès de la personne décédé et assuré de la réalité du décès. Dressé par nous Trépo, Clément Pierre Émile sous-lieutenant chargé de détails au soixantième Régiment d’Infanterie, officier de l’État Civil, sur la déclaration de Laque Georges soldat et de Girard Jean soldat, tous deux au soixantième régiment d’Infanterie témoins qui ont signé avec nous après lecture. Signé : Laque ; Girard et Trépo. Vu par nous Matuchet Eugène Victor Edouard, sous-intendant militaire de la quatorzième division pour légalisation de la signature de monsieur Trépo Clément Pierre Émile sus-qualifié. Vu pour légalisation de la signature de Monsieur Maluchet Eugène Victor Édouard. Paris le dix-huit décembre mil neuf cent quinze.
Le ministre de la Guerre par délégation. Le sous-chef du Bureau des Archives administratives signé : illisible. Mention rectificative :
Loi du trente septembre mil neuf cent quinze. Le défunt était né à Arnay-le-Duc, canton dudit (Côte-d’Or) et non à Arnac (Côte-d’Or) ainsi qu’il est mentionné dans le corps de l’acte ci-contre. Le ministre de la Guerre par délégation, le Chef du Bureau des archives administratives, signé : illisible. L’acte de décès ci-dessus a été transcrit le quinze février mil neuf cent seize, huit heures du soir par nous Jean Baptiste Sagrange, Maire de Saint-Prix.
[Signature] Sagrange


[Lien vers le document original]

Données additionnelles

Julien Denninger est le fils d’Émile Denninger, ouvrier alsacien ayant opté pour la nationalité française suite à la défaite de la guerre de 1870, et Marie Honorine Moreau, originaire d’Arnay-le-Duc. Julien fait partie d’une fratrie de 8 enfants, tous nés à Arnay-le-Duc à l’exception d’une dernière fille née en 1898 à Barive, dépendant de la commune de Saint-Prix-lès-Arnay où la famille s’installe entre 1892 et 1898. Par leur mère, les enfants Denninger sont cousins germains des trois frères Moreau, Charles, Georges et Robert, tués pendant la guerre.

Arbre généalogique des cousins Denninger et Moreau.
Cliquer pour agrandir.

En 1911, Julien Denninger et son frère Eugène vivent à Dijon, rue Petitot, chez leur beau-frère François Baudry. Ils travaillent à la biscuiterie Pernot de Dijon(5), qui est située à quelques mètres de leur résidence, rue Devosges. M. Baudry est biscuitier, et Julien ferblantier. Il doit donc participer à la fabrique des boîtes de biscuits.

Imagine d'une des nombreuses boites de biscuits Pernot, celle-ci pour le dessert Le Piou-piou, aux couleurs et à l’image des soldats de 14
Une des nombreuses boites de le dessert Le Piou-piou, aux couleurs et à l’image des soldats de 14

Une des nombreuses boites de biscuits Pernot, celle-ci pour le dessert Le Piou-piou, aux couleurs et à l’image des soldats de 14(6).

Ses parents et certains de ses frères et sœurs non mariés habitent à Saint-Prix-lès-Arnay.

Le 7 juin 1921, Julien Denninger est cité au Journal officiel :

DENNINGER (Julien), matricule 10126, soldat : brave soldat. Mort pour la France, le 25 septembre 1915, à Jonchéry. Croix de guerre avec étoile de bronze.

(7)

Le soldat Louis Godard du 26e régiment d’infanterie est tué le même jour que Julien Denninger dans le secteur de Beauséjour une dizaine de kilomètres plus à l’Est.

Eugène Denninger, frère de Julien, est cité dans la liste communale des anciens combattants blessés de guerre. Il souffre de « troubles gastriques intestinaux ».

Photographie de la tombe de Julien Denninger au cimetière d'Arnay-le-Duc
Photographie de la tombe de Julien Denninger au cimetière d’Arnay-le-Duc

Le soldat Julien Denninger est inhumé au cimetière communal d’Arnay-le-Duc, auprès d’autres soldats de la commune.

Carte

Sources

  • A. D. de la Côte-d’Or, état civil numérisé, Arnay-le-Duc 1885 – 1892 (FRAD021EC 26/035), Denninger Julien, n°66, 1892, vue 538/585.
  • A.D. de la Côte-d’Or, recrutement militaire (1867-1940), classe 1912, bureau d’Auxonne (R 2488), vue 137/449.
  • S.H.D, Mémoire des Hommes, Journaux des marches et opérations des corps de troupe, 60e régiment d’infanterie, 28 janvier 1915 – 25 juillet 1916 (26 N 652/2), vues 54-44/116.
  • A.D. de la Côte-d’Or, état civil numérisé, Saint-Prix-lès-Arnay (FRAD021EC 568/008), Denninger Julien (transcription), n°3, 1916, vues 357-58/368.
  • (1) (s.d.), Historique du 60ème régiment d’infanterie, éd. Berger-Levrault, p. 18 [En ligne] Version numérisé par Jean-Claude Finand.
  • (2) Henry, Frédéric (s.d.), « Bataille de Champagne, 25 septembre 1915 » in Colonel Adrien Henry [En ligne] (consulté le 29 juillet 2022).
  • (3) voir les articles : (13 avril 2008 ), « 25 septembre 1915 : jour le plus meurtrier » in Grande-Guerre 14-18 [En ligne] (consulté le 29 juillet 2022) ; et LAGNEAU, Laurent (5 mai 2018), « Selon le site Mémoire des Hommes, le 25 septembre 1915 aurait été le jour le plus meurtrier de l’histoire de l’armée française » in Zone militaire : opex360 [En ligne] (consulté 29 juillet 2022).
  • (4) A.D. de la Côte-d’Or, population, dénombrement de la population, Dijon Ouest 1911 (10 M 239-46), vue 315/401.
  • (5) Lequien, Claire (s.d.), « Une entreprise dijonnaise : la biscuiterie Pernot » in Musées et patrimoine de Dijon [En ligne] (consulté le 29 juillet 2022).
  • (6) Linder, M. (2011), « La manufacture des biscuits Pernot » in Dijon en 1900 [En ligne] (Consulté le 29 juillet 2022).
  • (7) (7 juin 1921), Journal officiel de la République française. Lois et décrets, p. 3051 [En ligne] Disponible sur Gallica.